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La Vachère d'A Côté
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2 mai 2011

Les indispensables du vacher

Pour survivre dans ce monde de brutes et de vaches taquines, il y a quelques astuces, et pas mal de "matériel"  vachement utiles au quotidien. 

L'équipement habituel de sécurité, qui est obligatoire : chaussures/bottes de sécu, c'est déjà pas mal.  

Une vache, ça a beau avoir deux onglons au lieu d'un seul ongle comme le cheval, quand elle les pose plus ou moins délicatement sur les orteils, c'est douloureux.... Et c'est pas comme un cheval, ça se pousse pas sur demande, pas toujours en tout cas.  Je me souviens d'une (plusieurs) fois, au Service ou avant, où mes pieds, dans des bottes ou chaussures normales, se sont malencontreusement retrouvés sous une vache. 

Un pied coincé (si j'ai du bol, ça m'est arrivé d'avoir les deux, et là on se sent con) sous 700kg de ruminant pas flippé, c'est assez handicapant. Et relativement douloureux (même si j'ai déjà tous les orteils cassés, ça m'apprendra à me balader pieds nus à côté des chevaux). 

Et forcément, dans ces cas-là, on pousse un bon gros juron bien bruyant, ça sert à rien, ça soulage même pas, mais ça prévient les gens autour qu'on est dans de mauvaises dispositions. 

On pousse la vache (comme on peut, on a pas beaucoup de puissance, vu qu'on est, par la force des choses, coincé/collé à elle), qui va éventuellement tourner la tête dans notre direction si elle se sent concernée, ou simplement bouger une oreille, façon "qui me paaaarle ?!".  Si c'est pas le bon jour (genre on s'est pris les pieds dans le chat en se levant le matin, et vidé le tuyau de la machine à traire, plein de flotte froide du lavage de la veille, dans les bottes en arrivant à 7h le matin, et j'en passe.... Ca sent le vécu, non ? ), elle va pousser dans l'autre sens, donc contre moi. Elle, elle a juste à basculer son poids d'un pied sur l'autre, la masse fait le reste. 

Et la vachère, elle tombe en arrière, se raccroche à ce qu'elle peut (et meeeeerdeeee.... c'était la vache à côté, qui se taille.... naaaaaaaaaaaaaaaaaaaan !!!) 

On peut éventuellement lui coller deux trois claques, mais vu l'épaisseur du cuir, elle s'en tape.  (c'est le cas de le dire). 

On peut essayer de lui donner des coups de pieds dans le membre qui nous écrase, avec le pied libre. Mais c'est assez acrobatique, d'autant plus si la grosse bête colorée a décidé de rigoler et nous pousse. 

 

Donc, on est un peu dans la merde. 

 

On en vient au deuxième indispensable du vacher : le couteau. Je parle pas d'éviscérer la vache ou de se trancher le pied, mais si on tient la lame dans la main, en laissant dépasser la pointe, on peut piquer la vache, et y'a beaucoup de chance pour qu'elle bouge enfin (avec un coup de vache au passage : coup de queue bien dégueu dans la tronche, coup de pied, de tête.... si elle nous tourne pas le dos en toussant au moment où elle chie. Là, c'est rigolo, et les petits souffrent en général). 

En plus, un couteau (mais genre opinel), c'est super bien pour plein de trucs : quand on doit ouvrir une botte de foin ou de paille (faut faire gaffe avec les hautes densités, les énormes bottes rectangulaires, les ficelles sont tellement tendues que ça claque bien quand on les coupe, donc éviter de laisser les doigts dessous/autour/à côté, ça fait mal. C'est pas mortel, mais désagréable), bidouiller une aponce ou raponcer deux fils de clôture (une aponce c'est une boucle, c'est du savoyard), vérifier si le courant passe dans la clôture sans se prendre un coup de jus (je DETESTE l'électricité, presque tous mes agriculteurs m'ont entendue hurler et jurer très grossièrement après m'être pris une châtaigne, et en plus ils trouvent ça drôle -__- ) : à hauteur d'un piquet en fer, on pose la lame sur le fil et le piquet, pour faire contact. Si le courant passe bien, ça claque assez fort et même ça fait des étincelles :) mais faut bien ne toucher QUE le manche en bois du couteau, sinon, la châtaigne, elle est pour vous, et le couteau n'a aucun intérêt. 

Ca sert à se curer les dents si le sauciflard du casse-croûte du matin a laissé des morceaux entre :D ou se curer les ongles (si on fait les deux, commencer par les dents. Après, c'est une question de goût...) 

 

Même pendant la traite ça sert, ça évite de retourner l'armoire à pharmacie, le matériel de parage, et toute la laiterie pour trouver un truc qui coupe assez pour tailler une rondelle dans le tuyau de lait qui s'est fendu et empêche de travailler correctement, ou quand un tuyau trop usé se débranche tout le temps. C'est hyper crispant, en plus c'est bruyant, et si c'est un jour où vous vous êtes vautrés dans le chat, c'est un coup à casser la salle de traite. 

 

Ca sert aussi à enlever les morceaux abimés ou pourris dans les fruits qu'on peut ramasser et boulotter en faisant des clôtures :D 

 

 

Ensuite, y'a, vachement utile, le téléphone AVEC DE LA BATTERIE, parce que éteint, il sert à rien. 

Quand on est en panne à 4km de la ferme, parce que le circuit hydraulique du chargeur du tracteur s'est mis en grève, et qu'on est tout seul ; quand on a une vache qui s'est esquintée au fond d'un pré ; quand on a repéré une vache en chaleur et qu'il faut appeler l'inséminateur ; quand faut appeler le véto ; etc.... ça sert vachement. 

D'où un complément au téléphone : un répertoire bien garni. Ou, à défaut, un collègue sympa qui peut jouer les standardistes >< 

 

Le collègue sympa peut être ajouté à la liste aussi, mais en général, vu qu'il est susceptible, ça le vexe, alors on évite. 

 

Petits exemples (vécus).  

- 9h30, je suis chez le Grand Manitou (c'est plus le Big Boss, il a rendu son tablier, donc je suis passée sous les ordres du Grand Manitou), qui est parti pour quelques jours. Je sors les vaches, quand j'en vois cavaler (chevaucher : qui se montent dessus), je regarde, des fois elles le font parce que ça les amuse, on bouge, tout ça, on grimpe sur les copines.... mais là, bingo, ça loupe pas, y'en a une en chaleur.  (pour les repérer, c'est assez facile, mais pas tellement finalement : quand ça chevauche, si celle qui est dessous se taille, c'est celle du dessus en chaleur ; si celle du dessous reste en place, reins un peu creusés, et oreilles très en arrière, façon "tête à connerie", c'est elle qui est chaude. Les chaleurs reviennent tous les 20 jours environ, tant que la vache n'a pas retenu l'insémination ou la saillie. Mais si y'a le taureau, on n'a pas à s'occuper de l'inséminateur évidemment) 

Je relève le numéro de boucle d'oreille (c'est les numéros d'identification, en gros sur les boucles oranges, pas les prix hein !!!), file dans la laiterie regarder le planning d'insémination, il me semble bien qu'il faut la faire inséminer. Je cherche les feuilles d'insémination pour confirmer, pas moyen de trouver. C'est 9h35, y'a une heure limite pour appeler l'inséminateur (il fait une tournée, donc il doit avoir toutes les infos pour l'organiser, enfin il me semble que c'est pour ça), mais j'ai une cervelle à trous, donc j'ai oublié l'heure, et dans l'urgence on met en œuvre deux des indispensables : le répertoire utile, et le collègue.  

Message au super collègue hyper sympa, qui répond illico (c'est samedi matin, pas encore 10h, et il est en congé ce week-end, faut quand même relever), j'ai jusqu'à 10h pour appeler, et il me dit où trouver les fiches d'insémination. 

 

Je trouve, vérifie, oui ! faut la faire reprendre.  Il est presque 9h40, les vaches sont descendues au fin fond du grand pré, et le grand pré est de l'autre côté de la départementale. 

Après moult péripéties, galopades, sprints, et visite du village et de l'église par la moitié du troupeau, j'arrête enfin de courir le temps de refermer la barrière du pré avec le troupeau moins une vache dedans, et file chercher le numéro de l'inséminateur. 

 

Et là, c'est le drame. Il est 9h54, je brasse les papiers, tourne (j'ai beaucoup tourné en rond), je trouve pas le numéro.  

Nouveau SMS à BobineLover : "HELP !!! j'ai pas le numéro je le trouve pas c'est la fin du monde !" (non, pas tout ça, et en super abrégé pour une fois, j'ai pas de temps à perdre). Je continue à brasser, bouge des grands calendriers, des papiers, file à la laiterie, retour au bureau... 

Le téléphone sonne : c'est mon dévoué collègue, et il y a juste le numéro, pas de message autour. Vu que je suis vachement douée avec mes doigts, j'essaye de mémoriser le numéro, le tape, appelle... merde, manque un bout. Retour au menu des messages, on recommence, finalement au troisième essai je tombe sur le répondeur du centre d'insémination, je dis une vache chez Grand Manitou, EARL (exploitation à responsabilité limitée ça veut dire, c'est une des formes de sociétés agricoles, Grand Manitou est associé avec Vieux Manitou Fringant, son papa)…. merde, c'est quoi déjà le nom de la ferme ?! je bafouille sur le message, finalement je trouve, et raccroche, soulagée. Il est 9h58 !!!! Je suis trop forte ! (et vachement bien entourée quand même). 

Je me dis aussi qu'il faut que je trouve comment appeler le numéro dans un sms sans faire quinze mille manips.... 

 

J'en profite pour enregistrer le numéro dans le répertoire, sous le nom "inséminateur secteur Grand Manitou", envoie un sms de mercis au collègue, et me mets en demeure de bloquer la vache (Câline) au cornadis pour que l'inséminateur n'aie pas à courir après dans tout le bâtiment. 

 

Pendant que j'essaye des astuces totalement inefficaces... (Câliiineee.... viens voir là, viens.... tiens, regarde les croquettes...) pendant dix minutes, je reçois mon engueulade, forcément, je l'emmerde un samedi matin.... Ah ben oui, en effet, les numéros étaient sur le dos d'un des grands calendriers.... 

Finalement, Câline s'est prise toute seule avec le foin, l'inséminateur, qui est un peu plus jeune que moi (ben oui, finalement, l'agriculture, c'est assez jeune comme secteur.... faut dire que vu le nombre d'agriculteurs qui se pendent par an (un peu plus d'un par jour), y'a moyen que la profession rajeunisse) m'a laissé un mot gentil que j'ai trouvé en revenant le soir, et  je me suis même pas fait pourrir parce que je l'ai dérangé un samedi matin de congé !!! \o/


- Le boss est en train de discuter avec un voisin, j'ai fini de démonter ma clôture, il faut ateller la tonne à eau au tracteur, un Vario. Je monte dans le tracteur, met tout au point mort (c'est à dire l'inverseur) comme dans les tracteurs classiques, je cherche, merde, ça commence mal, y'a un embrayage, mais pas de levier de vitesse. Y'a un genre de joystick, sur le côté, plein de boutons avec des dessins bizarres.... Je tourne la clef, le moteur tourne. j'essaye plein de trucs, j'arrive à relever le chargeur avant, pas moyen d'avancer...

SMS à BobineLover "dis-donc, toi qui l'aime vachement le Vario, comment on fait pour le faire avancer ?! "

Il a passé un bon moment à se foutre de ma gueule, a fini par me dire comment ça marchait, et au moment où j'y arrivais, le Boss revenait. C'est juste après qu'il m'a vidé la tonne dans les bottes ><

 


 

Dans le répertoire, y'a plein de numéros qu'il vaut mieux avoir, bien rangés pour pas passer 20 minutes à les chercher, en cas d'urgence : 

  • Les vétérinaires. 

je dis "les", parce qu'il faut tous les avoir, tous ceux du département ou presque. Chaque agriculteur a "son" véto (ou cabinet) ; en général les numéro sont marqués tous au même endroit, comme chez Grand Manitou, mais des fois non.... 

  • Les inséminateurs 

là aussi, "les". Pas parce que untel veut que ça soit Monsieur Moustache qui mette la main dans le cul de ses vaches, et pas Madame Tabouret, mais parce que les inséminateurs interviennent par secteur.  Donc, l'idéal, c'est d'avoir les numéros de tous les secteurs, pour pas se faire chier quand on est tout seul 

  • L'installateur ou concessionnaire de machine à traire, en cas de problème urgent (la machine à traire et le tank, c'est des urgences. Y'a des gros risques de mammites (infections et inflammations de la mamelle)  si on loupe une ou deux traites... Donc théoriquement ils répondent H24) 

  • Celui du tank (si le lait n'est plus refroidi, quand le camion passe, c'est un nid à germes s'il fait un peu chaud, et surtout c'est devenu un peu comme du fromage.... pas brassé et fermenté) 

  • Les concessionnaires d'engins agricoles, souvent y'a le numéro sur le tracteur (le bandeau pas joli, avec le logo du concessionnaire, le numéro, tout ça....), mais des fois non, et des concessionnaires y'en a pas mal quand même.... 

  • Bien évidemment celui du boss, que ce soit parce qu'il y a un problème, ou pour donner des nouvelles 

  • Idéalement, celui d'un ou deux voisins, au cas où.... 

 

Et dans le genre "indispensable", y'a la panoplie de MacGyver ! 

c'est un ancien vacher qui m'avait raconté comment il avait foutu son agriculteur sur le cul, en rentrant à la ferme avec un tracteur, sachant que le tracteur ne démarrait plus DU TOUT, au milieu d'un champ.... Il me semble qu'il a fait ça au tournevis :D 

 

On peut aussi ajouter un ou deux (sinon plus en hiver) changes COMPLETS. Je me suis déjà fait vider une tonne à eau dans les bottes, sous la pluie pendant qu'on démontait des clôtures, j'étais contente de pouvoir me changer intégralement de retour à la ferme....

 

 

Et un des plus importants : un véhicule qui ne craint plus rien !!! (et qui roule, c'est mieux).

Parce qu'il devra supporter les cottes de travail dégueux, des fois on voit plus le tissu tellement elles sont crades, les bottes, les chaussures de sécu, et faudra aller dans des endroits improbables des fois.

Et il fera beaaaauuuucoup de kilomètres, surtout si vos foyers originels sont un peu loin...

 

 


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Commentaires
S
Oh ma chéwii !<br /> <br /> "en général les numéro (avec un -s) sont marqués tous au même endroit, comme chez Grand Manitou, mais des fois non...."<br /> <br /> TADAAAAM
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S
Toujours est-il qu'une voiture, c'est bien, mais une voiture qui pue pas à quinze bornes c'est mieux. Surtout quand on y trouve également des cottes de mailles, des chats morts et des chiens cons. Et des orques. Et de la bouffe oubliée. Et j'en passe...
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L
Tes vaches ont un problème, elles sont vraiment sadiques XD C'est vrai que l'humain est si frêle à côté... comment<br /> dominer une bête pareil!!! T'es gore quand tu parles du curage de dents ou d'ongles X') "Se votrer dans le chat" a l'air<br /> d'être une pratique courante 8P<br /> ...<br /> ...<br /> En tout cas, merci bobineLover, je comprend mieux quand tu me disais que tu étais bien contente de l'avoir.<br /> Ca en fait des équipements tout ça 0_0° Stressant comme situation quand tu n'a pas la méthode complète avec même<br /> un seul élément manquant (comme le n°), et vu tout ce qu'il y a à faire et la diversité... bah il y en a des <br /> éléments x___________x ...<br /> La prochaine fois que je vais à la montagne (han, ça va faire des siècles j'ai mal au coeur) j'écouterais Jeanot parler<br /> avec attention. J'en connais un peu plus sur ce monde là... c'est con, je suis émue.
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M
Super ton blog, j'apprends plein de choses et ça me rappelle aussi pas mal de choses (toute ma famille est dans l'agriculture en Anjou, mes deux cousins de 23 et 25 ans ont repris la ferme du papi avec ses vaches, quand on va les voir j'aime bien les aider :) ). <br /> On rentre bien dans le récit, t'as une manière de raconter assez fluide et vivante.
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